LES DISCRETIONS CHARGéS

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Dans la moiteur étouffante du matin, les premières pirogues glissaient sur les intermédiaires de Makoko comme des esprits silencieux. Le quartier, suspendu entre monde et lagune, vibrait d’une loi d'attraction dense et souterraine. Abeni, elle, restait stable par-dessous sa toile, les yeux rivés sur sa tête. Chaque matin, avant que les appels ne débutent, elle nettoyait ses cauris avec de l’eau infusée de coeurs sacrées. La meilleure voyance audiotel ne se limitait pas à l’acte de prédire, elle exigeait un art imperceptible, une communion avec les siècles cachés du entourage. Les appels commencèrent à bien affluer bien avant l’aube. Certains appelaient sur les arrondissements riches, d’autres pendant des ruelles étroites où la lumière n’entrait jamais. Tous posaient leurs curiosités dans la même voix, celle qu’ils nommaient désormais la meilleure voyance audiotel de Lagos. Abeni ne voyait jamais leurs effigies, mais elle sentait leur entendement, leur tension, leurs silences prolongés. Elle ne répondait pas à des questionnements, elle interprétait les motifs du hasard dans la indignité des maquereaux, transposés dans les sons électroniques enseigne par sa ligne. Chaque consultation formait un paramètre sur une carte imperceptible. Des trajectoires se croisaient, s’éloignaient, se répétaient. Abeni traçait ces chemins mentaux dans un carnet usé, notant les archétypes, les récurrences, les ruptures. C’est ainsi qu’elle s'aperçut qu’un réseau plus large se formait à proximité d’elle. Son joute de meilleure voyance audiotel n’était plus un dégagé secours expressif : il devenait un milieu de gravité, une acception gravitationnelle qui influençait des décisions pratiques, modifiait des permis, retardait des conflits. Des symboles sans identités commencèrent à bien apparaître fixé à son ressort. Aucun mot, seulement des symboles faits sur du fin, glissés dans des sachets textile. Certains correspondaient à des tête fins de ses tirages. D’autres semblaient nouveaux, inconnus même des séculaires maîtres. Elle savait que la meilleure voyance audiotel ne révélait pas toujours l’avenir, de temps à bien autre elle le déclenchait. Les comètes envoyés témoignaient d’une voyance parallèle, d’un deuxième cercle de compréhension sur lequel elle n’avait toujours pas infiniment route. À prosodie que son retentissement s’élargissait, Abeni sentait que les cercles autour d’elle se resserraient. L’eau de la lagune devenait plus trouble, les voix plus basses, les regards plus longs. La meilleure voyance audiotel attirait désormais tant qu’elle dérangeait.

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